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France : Montée d’actes anti-migrants dans le Nord avant les législatives

France : Montée d'actes anti-migrants dans le Nord avant les législatives

Actes anti-migrants en France – Dans le nord de la France, où le Rassemblement national a réalisé de forts scores aux élections européennes, les associations d’assistance aux migrants restent sur le qui-vive. Elles dénoncent une recrudescence des discours et des actes racistes à l’encontre des populations exilées. Plusieurs incidents ont déjà été signalés ces derniers jours.

Claire Millot, vice-présidente de l’association Salam qui aide les migrants, exprime son indignation : « Madame Bouchard [maire de Calais] alimente depuis des années la peur parmi les gens : ‘Vos enfants sont en danger’. Mais en danger de quoi ? », s’interroge-t-elle. « Les migrants ne vont pas s’enfuir avec des enfants sous le bras ! C’est irresponsable de tenir de tels propos. Et maintenant, regardez la situation… »

Cette situation évoquée par Claire Millot se déroule à Dunkerque, à 50 km de là, précisément dans le campement de Loon-Plage où vivent des centaines de migrants. Dans la nuit du 13 au 14 juin, la réserve d’eau potable des exilés a été intentionnellement contaminée par un agent inconnu. Au matin, un liquide bleu en suintait.

« Les témoins ont rapporté une légère saveur sucrée. Les autorités ne sont pas tenues responsables, nous penchons plutôt vers un acte isolé », continue Claire Millot. Une plainte a été déposée et un échantillon a été envoyé pour analyse. « Je ne pense pas, je n’espère pas, que ce soit du poison… Mais même si ce n’est pas le cas, le message est clair », déplore-t-elle. « Il n’est pas nécessaire de l’expliquer… Oui, nous avons peur de ces actes racistes, nous craignons ce que certains pourraient faire aux exilés. »

Dans cette région entre Calais et Dunkerque, où des milliers de migrants espèrent rejoindre l’Angleterre depuis des années, les relations entre immigrés et habitants se sont progressivement dégradées. L’extrême droite s’est enracinée, faisant de ce territoire un symbole d‘ »immigration incontrôlée » pour le Rassemblement national (RN). Calais en est l’exemple flagrant : la ville a accordé 57 % de ses voix à Marine Le Pen lors de l’élection présidentielle de 2017, et 61 % cinq ans plus tard, ainsi qu’une majorité aux européennes de 2024.

« C’est une montée de l’extrême droite et une libération de la parole raciste qui obligent les associations à être plus vigilantes dans leurs déplacements et la protection des migrants », affirme Juliette Delaplace du Secours catholique à Calais. « J’ai reçu des témoignages de migrants visés par des jets d’eau de Javel à un arrêt de bus, juste après la dissolution [le 9 juin, ndlr]« , rapporte-t-elle. « Un autre a mentionné avoir été attaqué avec une bombe à eau remplie d’un liquide sale. »

D’autres militants signalent des jets de pierres devant les locaux du Secours catholique. Une voiture a ralenti à proximité et des individus ont lancé des projectiles sur des exilés se tenant sur le trottoir.

« Pendant les deux dernières semaines, nous avons constaté une augmentation des incidents… », ajoute Pierre Roque de l’Auberge des migrants. « Nous pensons que ces incidents sont liés à des électeurs du RN, convaincus de leur victoire anticipée. Il serait étrange de ne pas faire le lien avec les élections législatives, n’est-ce pas ? »

« C’est vraiment triste », poursuit-il. « Ces personnes, probablement animées par un fort sentiment de déclassement, se retournent contre des personnes encore plus vulnérables qu’elles-mêmes. »

Au cours de la même semaine, les murs d’un ancien squat de migrants à Calais ont été vandalisés avec des graffitis racistes. Sur une photo consultée par InfoMigrants, on peut voir des messages écrits en noir sur un mur blanc, dont « Leave or Burn » (Partez ou brûlez) et « À bas la tyrannie migratoire ».

« On savait que cela finirait par arriver un jour… », commente Claire Millot de Salam. « Je milite dans le nord depuis des années, je n’ai jamais craint de tels actes violents. Mais désormais, je suis beaucoup plus prudente », confie-t-elle. « Je vérifie que ma maison n’est pas taguée quand je m’en vais, que ma boîte mail ne contient pas de messages haineux. Parce que maintenant, je sais que cela pourrait arriver. »

L’association Utopia 56 se dit également sur ses gardes. « Nous avons déjà dû faire face à l’extrême droite par le passé. Nos locaux et nos véhicules ont été vandalisés », explique Charlotte Kwantes, coordinatrice nationale à Paris. « Nous redoutions que cette tendance ne s’aggrave avec le score du RN… Et en moins d’une semaine, des actes hostiles se sont produits, ce qui est extrêmement préoccupant. Nous craignions des menaces, nous sommes désormais confrontés à des actions concrètes. »

Jordan Bardella a annoncé que s’il devenait Premier ministre en cas de victoire aux élections législatives anticipées de juillet, « la question de l’immigration et du contrôle des frontières » serait « une de ses priorités ». Son programme inclut une « loi d’urgence » pour faciliter et accélérer les expulsions, ainsi que la suppression du droit du sol et de l’aide médicale d’État (AME).

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