Le gouvernement ivoirien a récemment initié une nouvelle série d’évictions à Abidjan, une pratique connue sous le nom de « déguerpissements », où les autorités détruisent les quartiers informels. Après les récentes évictions dans les communes de Yopougon et d’Attécoubé, c’était au tour du quartier des ferrailleurs d’Anoumabo, à Koumassi dans le sud d’Abidjan, le samedi 16 mars.
Les sentiments d’injustice et de frustration sont palpables parmi les habitants affectés. Un résident s’exclame : « L’État se comporte comme un voyou ! Le droit est bafoué en Côte d’Ivoire pour donner l’illusion que tout va bien. Mais ce n’est pas le cas ! ». Des jeunes hommes fouillent les décombres à la recherche de biens qu’ils pourront revendre, ne disposant que de trois jours pour évacuer leurs ateliers ou leurs maisons après avoir été avertis par la mairie mercredi dernier.
« Nous n’avons reçu aucune notification préalable, aucun préavis », rapporte Kalif Konaté, vice-président de l’association des ferrailleurs ivoiriens. « Nous avons appris la nouvelle sur les réseaux sociaux. Nous ne disposons pas des moyens pour anticiper. Nous récupérons ce que nous pouvons immédiatement. Ce que nous ne pouvons pas emporter, nous le laissons car ils viendront le démolir. Ce qui est sûr, c’est qu’on nous a seulement dit de nous préparer pour après-demain, car c’est ce jour-là qu’ils viendront tout prendre ».
Bien que le gouvernement ait annoncé des mesures d’accompagnement telles qu’un plan de relogement et une indemnisation, ces actions sont jugées largement insuffisantes par Pulchérie Gbalet, militante de la société civile. Elle vient de fonder une coalition d’ONG, de personnes déjà déplacées et de celles menacées de l’être. « La première mesure consiste à donner 250 000 francs CFA [environ 380 euros] à chaque ménage », rappelle-t-elle. « Mais que peut-on faire avec 250 000 francs ? À Abidjan aujourd’hui, cela ne suffit même pas pour se loger dans un quartier précaire. Nous déplaçons ainsi les gens pour les envoyer vers d’autres situations précaires. Ce n’est ni logique ni un développement. Cela revient finalement à faire la guerre aux plus démunis ».
La coalition a entrepris de recenser les populations touchées afin de les aider à demander des indemnisations ou à engager des recours en justice. Pendant ce temps, les habitants du quartier des ferrailleurs d’Anoumabo tentent de sauver ce qui peut l’être en attendant le retour des pelleteuses le lundi 18 mars 2024.
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