Il y a un mois, de nombreux observateurs déclaraient que le président Macky Sall avait mal terminé son mandat en reportant l’élection présidentielle prévue pour le 25 février 2024, à la veille du début de la campagne électorale.
Aujourd’hui, Macky Sall s’efforce de redorer son blason terni depuis les événements de mars 2021. Une réputation qu’il avait pourtant réussi à améliorer en renonçant à briguer un troisième mandat. Le report de l’élection présidentielle a été une déception pour les partisans du respect de la légalité.
Partout, la mobilisation est en marche. Le mot d’ordre est clair : empêcher Macky Sall de prolonger son mandat au-delà du 2 avril, une perspective qualifiée de coup d’État institutionnel par certains membres de l’opposition et de la société civile. Quatre personnes ont perdu la vie lors de manifestations contre le report de l’élection présidentielle. Le Sénégal est redevenu le centre d’attention des médias internationaux, avec une forte présence de la presse internationale. Ce qui n’a pas laissé Macky Sall indifférent, celui-ci se plaignant à plusieurs reprises du traitement médiatique des événements survenus après sa décision de reporter le scrutin. Il est clair que Macky Sall a dû prendre en considération l’impact de cette situation sur son image à l’échelle internationale.
Cependant, en moins d’un mois, Macky Sall a réussi à redorer son image. Suite au rejet par le Conseil constitutionnel des conclusions du dialogue national organisé le 28 février, alors même que l’Assemblée nationale votait une loi d’amnistie, Sall a émis un décret fixant la date du 24 mars pour la tenue de l’élection présidentielle. Cela a entraîné la libération d’Ousmane Sonko et de son protégé Bassirou Diomaye Faye, qui a finalement remporté l’élection présidentielle, ainsi que de nombreux militants de l’ex-Pastef.
En remerciant le dernier gouvernement dirigé par Amadou Ba, Macky Sall a nommé une personnalité consensuelle, Mouhamadou Makhtar Cissé, au ministère de l’Intérieur. Cissé jouit d’une réputation d’intégrité presque unanime. Le lendemain de l’élection présidentielle, Macky Sall a félicité Bassirou Diomaye Faye pour sa victoire, suivant ainsi l’exemple de son candidat Amadou Ba, sans attendre même la publication officielle des résultats.
Macky Sall ne s’arrête pas là. Le jeudi 28 mars, il a reçu son successeur et son mentor au palais présidentiel. C’était une poignée de main avant l’heure…
Ainsi, Macky Sall s’inscrit dans la longue tradition sénégalaise inaugurée par Senghor en 1980, lorsque celui-ci a décidé de passer le flambeau à son Premier ministre Abdou Diouf après 20 ans au pouvoir. Diouf, après avoir initié un processus d’ouverture démocratique ayant permis la création de partis comme le PDS, a à son tour cédé la place à Abdoulaye Wade en le félicitant pour sa victoire le 19 mars 2000. Macky Sall a également reçu l’appel du « Pape du Sopi » le 26 mars 2012, où ce dernier le félicitait à son tour pour sa victoire.
Si Diouf et Wade ont passé le pouvoir à leur principal opposant après une élection à laquelle ils ont eux-mêmes participé, Macky Sall, lui, transmet le pouvoir au protégé de son principal opposant. Cependant, cette poignée de main chaleureuse entre Macky Sall et Diomaye, mais surtout entre Macky Sall et Sonko, est perçue par Ibrahima Bakhoum, analyste politique, comme « un moyen de partir en paix ».
« C’est un message fort qui montre que malgré notre passé d’adversaires, nous pouvons faire la paix maintenant que le pouvoir passe à d’autres mains. Et ces mains appartiennent à Diomaye, un dauphin d’Ousmane Sonko », explique le journaliste.
Monsieur Bakhoum insiste sur le caractère significatif de ce geste, affirmant que cela permettra à Macky Sall de revenir sereinement au Sénégal s’il le désire, la dernière image étant celle de lui et de son successeur se serrant la main.
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